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Avant-propos Beate Klarsfeld

      En juin 1940, au moment de la défaite française, environ 320 000 Juifs vivaient en France. Quatre ans plus tard, après la Libération, un quart avait péri. Sur ce nombre, 76 000 avaient été déportés ; 3 000 avaient été envoyés dans des camps français ; et 1 000 avaient été exécutés. La moitié de ces 320 000 Juifs étaient français ; parmi eux, beaucoup avaient été naturalisés. L'autre moitié était composée d'étrangers. Certains étaient venus en France dans les années 20, après l'effusion de sang de la Première Guerre mondiale, lorsque le pays avait grand besoin d'ouvriers. D'autres, des réfugiés, avaient fui l'Allemagne d'Hitler ou l'Anschluss (le « rattachement ») de l'Autriche. Ce sont ces réfugiés juifs venus d'Allemagne et d'Autriche qui couraient le plus grand risque au moment de la persécution.
Le 2 septembre 1939, au début de la guerre, des hommes de toutes les régions du pays — ceux que la France avait choisi de considérer comme des « ressortissants d'un pays ennemi » — étaient internés dans des camps. Les femmes regardées comme suspectes étaient déportées dans le Sud, au camp de Rieucros en Lozère. En mai 1940, lorsque les Allemands envahirent la France, encore un plus grand nombre de femmes et d'enfants furent arrêtés, la plupart étant envoyés au camp de Gurs dans les Pyrénées-Atlantiques. Bien que beaucoup aient été libérés après l'armistice, quelques mois plus tard, le 4 octobre 1940, en vertu des lois anti-juives de Vichy et du Maréchal Pétain, les préfets eurent l'autorisation d'arrêter de façon arbitraire et d'interner les « étrangers de race juive » dans des camps spéciaux.

Une fois de plus, les camps se remplissaient de victimes. Certains, arrêtés en tant qu'Allemands ou Autrichiens l'année précédente lorsque la France était en guerre, étaient à nouveau arrêtés en tant qu'« é trangers de race juive », maintenant que le pays collaborait avec les Nazis.

      Pour la petite Ruth, âgée de quatre ans, la saga de sa famille juive allemande commença en 1941 à Toulouse, dans la Zone libre, gouvernée par Vichy, où aucun soldat allemand n'était cantonné. Là il y avait aussi des milliers de familles juives étrangères internées dans des camps, quelquefois dans des conditions inhumaines. Dans la Zone occupée, les camps destinés aux hommes juifs avaient été établis en mai 1941 ; mais à partir de juillet 1942, les femmes et enfants juifs devinrent également la cible d'arrestations.
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      À la fin de la guerre, la famille proche comptait deux victimes — 2 sur 10. Le taux de morts pour l'ensemble de la population juive en France était de 1 sur 4. Dans toute l'Europe, le pourcentage d'enfants juifs parmi les déportés correspondait au pourcentage d'enfants dans la population juive, c'est-à-dire 23 pour cent ; mais en France, il n'était que de 14 pour cent. Pourquoi une telle différence ?

      Certainement pas en raison de la compassion de Vichy pour les enfants juifs, mais parce qu'une autre France veillait et parce qu'en dehors du pays, la vraie France du Général de Gaulle combattait aux côtés des Alliés. Les enfants ont été sauvés grâce aux actes d'individus courageux, qui ne pouvaient tolérer de voir leur pays renier ses traditions d'honneur et d'hospitalité en livrant des milliers de familles juives à des bourreaux, qui ne cachaient pas leurs desseins criminels. L'histoire de Ruth/Renée est le récit du sauvetage des Juifs. C'est une histoire personnelle qui incarne l'histoire collective de ces Juifs étrangers qui ont échappé à la déportation et aux chambres à gaz alors qu'il aurait été si facile de les dénoncer.
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      L'histoire de Ruth est émouvante dans sa simplicité. À travers l'espoir, la terreur, les réunions et les séparations, c'est le récit d'une enfant qui n'a jamais oublié qu'elle était juive, le récit d'un grand nombre d'enfants cachés qui ont été sauvés de la Shoah, et celui de milliers d'autres dont la vie, pourtant similaire, fut anéantie par la haine des Juifs. L'histoire de ces enfants cachés et perdus est contenue dans les deux mille pages du livre Le Mémorial des Enfants juifs déportés de France[1]. Le récit des enfants cachés et retrouvés est contenu dans Tu t'appelles Renée, un livre que tout le monde devrait lire pour comprendre la complexité de la France de l'époque ainsi que les conditions de survie des Juifs vivant dans ce pays.
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[1] Serge Klarsfeld, Le Mémorial des Enfants juifs déportés de France. édité et publié par l'Association « Les Fils et Filles des déportés juifs de France » et par « The Beate Klarsfeld Foundation », Paris, octobre 1994.
TABLE DES MATIÈRES   |    Préface de l’auteur   |    EXTRAITS

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Tu t'appelles Renée :
Paroles d'une Enfant cachée
dans la France de Vichy (1940-1944)
Auteur : Stacy Cretzmeyer
Traductrice : Ruth Kapp Hartz

Broché, 14 x 21,6 cm
17 illustrations, index, 250 pages
ISBN 0-9743158-2-6, $16.95
Tu t'appelles Renée $16.95

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