Préface d'Armand Idrac - Cover Page

AVANT- PROPOS

par
Emmanuel Le Roy Ladurie,
Universitaire et écrivain,
professeur honoraire au Collège de France
et membre de l’Institut

      Armand Idrac et moi, avons un débarquement en commun. On lira sa version, infra au Chapitre VI dans le présent ouvrage. Voici maintenant la mienne du début à la fin de cet « épisode »... Disons en conséquence que, s'agissant de nous deux et de bien d'autres au
6 juin 1944, le débarquement ouvrait un nouveau chapitre. Pendant deux mois et demi, ce fut un incroyable, parfois effrayant, parfois merveilleux, jeu de gendarmes et de voleurs. Le ciel était joliment bleu : les bombes et les obus dont nous abreuvaient les Anglais, d'abord chez mes parents, puis dans la poche de Falaise où nous eûmes l'étrange idée de nous réfugier, n'étaient pas très dangereux à condition, truisme, qu'ils ne nous tombent pas directement dessus.

      [...] j'aperçus un premier soldat allié, et libérateur ; je voulus lui demander du sucre, denrée dont nous étions privés. Je rassemblai tout ce qui restait de mes leçons d'anglais, et prononçai un mot qui ressemblait phonétiquement à çu-gare (sugar). A la suite de quoi, quiproquo mortifiant, l'Anglais - c'était inévitable - sortit de sa poche un cigare, et me le tendit aimablement.

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      Voici maintenant un fragment du journal de débarquement de ma sœur aîné (16 ans à l'époque), qui raconte et encadre
l'entrée d'Armand Idrac à notre foyer, au début des trois mois fatidiques.